Je lis. Souvent. Trop d’après Guillaume. N’ayant pas grand chose à me mettre sous la dent en ce moment, je profite de notre escale à Beaufort, Caroline du Nord, pour prendre le journal.
Auteur/autrice : Anso
On est en route pour Charleston, ce midi, je prépare des linguini aux asperges vertes accompagnés d’une sauce à la crème fraîche épaisse de France (UHT, retrouvée dans le fond d’un équipet), parmesan, cumin, fleur de sel de Bonavista et tour de poivre. Hier, c’était un risotto au pesto, petits-pois carottes. Franchement, ce n’est pas mauvais. Si nous n’étions pas obligés de manger ce type de nourriture tous les jours, on trouverait même ça bon. Mais voilà, on se lasse. Du coup, on fantasme sur la nourriture.
Où l’anglais nous fait défaut
Vite ! Un cata est à l’approche du pont, il demande son ouverture à la VHF. Remontons l’ancre, on suivra dans la foulée. Ni une, ni deux, Guillaume est sur le pont, à la barre je soulage le guindeau pendant qu’il hisse le mouillage. On ne peut quitter Ariane comme ça, il faut leur dire au revoir. Oleo passe près de nos voisins, on se salue. Saperlipopette, le pont se referme !
Oleo est en mer entre les Bahamas et la Floride. Les filles lèchent le fond du plat pendant que je mets à cuire le gâteau au chocolat. C’est l’anniversaire de Charlie, 3 ans aujourd’hui !
Que mange-t-on quand on n’a pas de frigo, pas de four, pas de supermarché au coin de la rue ? Quelques recettes de fond de cale, à tester, ou pas.
Voici presqu’un an que nous naviguons avec nos deux petites, Charlie, 3 ans ce mois-ci, Axelle, 15 mois maintenant. Que dire sinon que nous sommes des parents comblés ? Le bateau, surtout en navigation, est le lieu propice aux câlins, aux longs moments dédiés aux histoires, aux jeux, aux chansons. Nous voulions passer du temps avec nos filles avant qu’elles soient trop grandes, mission accomplie !
Guillaume me fait la leçon pour que mes articles aient des titres plus explicites. Il paraît que ça améliore le référencement. Peut-être. Personnellement, je trouve que ça manque de charme. Je fais tout de même un essai, après « Les Exumas pas à pas », voici « Eleuthera, dernière étape aux Bahamas ». N’hésitez pas à écrire une pétition au capitaine pour revenir aux titres qu’il juge phatiques, sinon je serai vexée.
Pendant qu’Oleo approche de Lee Stocking Island dans les Exumas, Axelle trempe dans un bain. On tente d’atténuer les tâches de mercurochrome dont elle s’est barbouillée, la banquette avec. Guillaume veille sur la route et prépare le mouillage. Charlie, elle, joue dans le cockpit. Je respire à plein poumon le vent doux. Il charrie dans son sillage l’odeur des résineux, des jours heureux, d’un soupçon d’ailleurs aussi.
Les yeux rivés sur le sondeur, les chiffres défilent : 2m10, 1m90, 2m, 1m90, 1m80, 1m70, 1m60, 1m50, 1m40, 1m30, oups ! Le tirant d’eau d’Oleo est de 1,30 mètre, marche arrière toute. On est positionné devant la passe de Hog Cay Cut mais celle-ci ne se laisse pas faire. Il y a un chemin dans le banc, mais où ?
Friendly Neighbors
Après avoir salué Ed, Oleo s’en va vers Flamingo Cay. Dans la passe, un vent contre courant soulève des vagues escarpées. La proue du bateau pique dans les creux, droit sur les rochers. Heureusement, nous avons tout juste assez d’eau pour passer. Nous mouillons sur la fabuleuse plage du nord de l’île. Le bateau se balance doucement, seul au milieu d’une piscine turquoise, dans deux mètres d’eau cristalline. La baie est bordée d’une magnifique étendue de sable blanc. On entend chanter les oiseaux. Le sable est si fin qu’on dirait de la farine soyeuse.
A la Robinson
30 heures de navigation et nous voici presque arrivés à Raccoon Cay, petite île déserte des Bahamas. Oleo louvoie lentement entre les récifs coralliens, un gros requin noir nous fait une queue de poisson. Plus loin, une maman dauphin nous salue avec son petit.
Crème solaire, chapeaux, lotion anti-moustiques, biberon, eau, compotes, couches, serviettes, qu’oublie-t-on ? Les jeux de plage, les clés de l’annexe. Il faut aussi penser à prendre la poubelle, ça y est, nous sommes prêt pour aller à terre ! Ah non, Charlie doit passer aux toilettes et j’enfile mon maillot. Guillaume, l’annexe est-elle à l’eau ? Le plein est fait ? Super, on y va.
C’est l’enfer. Chahutés par le vent et la houle sur un île sans abri accessible après 5 jours de navigation, l’équipage est défait. Le temps est trop mauvais pour envisager de continuer notre route. Nous sommes épuisés. On maudit pêle-mêle le vent, la mer, le bateau, les voyages autour du monde, les Bahamas en particulier.
Ohé, ohé, matelot
Des îles vierges aux Bahamas, nous voici repartis pour une longue navigation. 5 ou 6 jours, ce n’est rien comparé à la transat’ me direz-vous. Oui, mais tout de même.
Bienvenus aux BVI, un archipel d’eau turquoise et de sable fin. Encore un, me direz-vous ! A vivre sous les cocotiers, peut-on encore s’extasier de la limpidité de l’eau, des nuances infinis de ses couleurs, de la vie colorée sous-marine, de l’odeur terre et mer, de la saveur de la noix de coco ou du jus fruité de maracuja ?