Nos amis sont déjà partis pour Gigha quand nous quittons Islay ce matin. Ça souffle bien, le courant est favorable, tout va pour le mieux…
…jusqu’à ce que dans le rail du North Channel le vent baisse, le courant s’inverse et le brouillard s’installe. Ce sont les risques du métier. Corne de brume à la main, je réponds au cargos, ouvre l’oeil et supplie le vent de revenir.
Le soir venu, le brouillard est toujours là et le contre-courant aussi. Je décide de mettre le cap vers un mouillage du côté de Black Head mais le vent revenant et le brouillard s’estompant, je continue ma route. Le courant s’inverse, le vent forcit, nous traversons la baie de Belfast au portant à 8 noeuds, une pointe de vitesse qui nous mènera jusqu’à l’île de Man.
Au sud-ouest de l’île de Man, il y a une étroiture entre une petite île dénommée « Calf of Man » et l’île de Man elle-même. Courants et remous s’y donnent à coeur joie, c’est pourquoi j’hésite à m’y risquer… finalement oui, j’y vais, ça passe ? ça passe pas ? Ouf ! ça passe ! Les hauts fonds génèrent des barres de remous que l’on passe en retenant sa respiration et en se disant « pourvu que ce ne soit pas un récif ».
Mis à part cet épisode, nous ne ferons pas grand chose à Man si ce n’est prendre une bouée pour un déjeuner rapide à St Mary et repartir, car les prévisions météo sont favorables. Les prévisions seulement, car les 10 noeuds de vent prévus s’avèrent une pétole complète pendant des heures. Bref, nous continuons vers le sud où nous arriverons dans l’île de Skomer après trois nuits passées en mer.
En plein milieu du canal St Georges, un remorqueur nous arrive dessus et nous intime l’ordre à la VHF de nous dérouter à l’ouest. Dommage, on a pourtant du vent et du courant favorable. Trois miles de perdu plus tard il nous remercie. Nous ne savons pas sur quoi ne faisions cap mais entre temps j’attrape avec difficulté un ballon en mer qui fera un cadeau coloré à Charlie pour ses trois mois. Essayez-donc d’attraper un ballon avec un sceau suspendu à un bout.
La deuxième surprise, c’est notre arrivée à « St David’s Head ». Je décide un instant qu’on mouillera à l’île de Ramsey plutôt que Skomer car il faut officiellement demander la permission d’entrer dans la réserve. Mais arrivé à « Bais bank », Oleo est dérouté à l’Ouest et même moteur allumé je n’arrive pas à garder mon cap au sud ! Voiles déployées et cap à l’Ouest, on contourne St David à plus de 10 noeuds. Je savais qu’il y aurait un courant qui nous déporterait mais pas aussi fort.
Bref, merci « Bais Bank » ! Car notre escale à Skomer a été très sympa. L’île est belle et les milliers d’oiseaux qui y nichent sont irrésistibles. Je regrette de ne pas les avoir filmés. Pour en savoir plus sur cette escale, il y a un article dédié.
Le lendemain, départ direct pour les Scilly. Le vent nous manque au début mais ne tarde pas à s’installer. Dans l’après-midi, un pigeon bagué que nous avons baptisé « Jack » s’invite sur Oleo.
Il fait le tour du bateau puis revient dans le cockpit avec nous et accepte volontier le bol d’eau qu’Anso lui offre. On à beau lui tourner autour, aucun signe de peur. On prends juste la précaution de ne pas le toucher.
En soirée, ce sont les dauphins qui viennent nous voir en grand nombre. Ils tournoient autour du bateau et nous pouvons un instant les montrer à Charlie.
Le vent est un peu faible mais nous avançons bien grâce au courant et au spi. Nous passons la soirée en compagnie de Jack et des dauphins.
Parmi eux, il y en a un qui saute mais je n’arriverai pas à le prendre en photo correctement. Ce sont des dauphins de taille moyenne, entre les marsoins et les grands dauphins.
Nuit en mer tranquille et chaude, pas trop de pêcheurs pour nous foncer dessus, un plaisir. La mer est tellement calme que nous profitons le lendemain d’un barbecue dans le cockpit.
Puis nous atteignons les Scilly après un brouillard et une courte pétole. Nous hésitons à entrer dans « St Helen’s Pool » au nord de Tresco, nous y renonçons pour nous abriter au Sud d’une petite île dénommée « Great Ganilly » qui fut un mouillage aussi parfait que tranquille. Repos, puis moteur direction une petite plage au Sud de l’île Saint Martin pour y échouer.
L’eau est claire, mon calcul de marée m’oblige à venir me poser tout près de la plage sur un sable fin, dur et parfaitement plat, un échouage rêvé qui me permettra de régler mon problème d’hélice qui émet un cliquetis.
C’est toujours la même anode qui se détache. Je démonte l’hélice, ce qui est casse-pied car c’est une max-prop ancienne génération, change l’anode en mettant du frein-filet sur les vis et remonte le tout, en moins de 3 heures. J’aurai même le temps d’aller faire quelques courses dans le village. Peu après, le problème persistera. J’accuse aujourd’hui le coupe-orin situé entre l’anode fixe et l’arbre tournant, qui doit certainement s’accrocher à l’arbre et entraîner l’anode par friction.
Nous changeons de mouillage pour une baie au Sud-Est de St Martin qui nous permettra de partir tôt le lendemain, météo oblige. Nous aurions aimé rester aux Scilly plus longtemps, dommage de partir après 2 nuits seulement !
Mais les conditions nous donneront raison et notre périple en Manche fera l’objet du prochain article. En attendant, Charlie va bien, elle grandit et ses yeux restent bleus à la grande joie de ceux qui ont parié qu’ils le resteront.