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Atlantique 2015 Lecture / Culture

Techniques de mouillage

Voici un article sur les différentes manières de mouiller une ou plusieurs ancres. Ces informations sont issues de notre expérience qui évolue sans cesse. Pour chaque cas, une description des avantages et inconvénients.

Pour mouiller que faut-il ? Des ancres de bonne qualité bien sûr, autant de chaine que l’on peut et aussi lourde que possible, du câblot, des mains de fer, un orin, du cordage, un guindeau et n’oublions pas de bonnes protections et de la vigilance car une grande partie des abandons de voyage ont pour cause un accident de mouillage.

Le mouillage classique avec l’ancre principale

Mouillage classique avec une ancre

Utilisé dans la majorité des cas quand il y a de la place. On met systématiquement l’orin si on mouille profond ou par fond autre que du sable. Le principal avantage de cette configuration est la simplicité et la facilité de mise en œuvre. Le premier inconvénient est que le rayon d’évitage est grand, surtout si on met beaucoup de chaîne, ce qui peut s’avérer utile s’il y a du vent et qu’il y a du fond. Deuxième inconvénient : si le mouillage lâche ou chasse, il n’y a rien d’autre pour retenir le bateau.

Dans les zones encombrées, en général tout le monde mouille de cette manière et on évite tous ensemble quand le vent (ou le courant) change de sens… mais ce n’est pas sans risque, car les chaînes peuvent se croiser et celui qui a déroulé 20m n’évite pas comme son voisin qui a déroulé 50m, c’est pourquoi je n’aime pas trop ce genre de situation. Le mouillage classique est en revanche très bien dans une zone peu encombrée, avec un mouillage principal bien dimensionné et de l’eau à courir derrière en cas de problème.

L’empennelage

Empennelage

Apparemment beaucoup de monde apprécie cette configuration utilisée quand il y a du vent fort ou des fonds de faible tenue. Cette technique consiste à frapper une deuxième ancre sur la chaîne de l’ancre principale, ainsi si la première décroche l’autre vient en secours. J’avoue que cette configuration présente à mes yeux plus d’inconvénients que d’avantages. On double l’ancre mais pas la chaîne… si celle-ci lâche (usure, ragage ou fissure d’un maillon, ça peut arriver), le bateau s’en va et on perds deux ancres. D’autre part, la chaine peut raguer contre la deuxième ancre et la récupération du mouillage peut s’avérer fastidieuse si on doit le faire dans l’urgence.

Le plomb de sonde

Mouillage en plomb de sonde

Cette technique consiste à mouiller simplement l’ancre principale et à poser une ancre secondaire « en plomb de sonde » sous l’étrave du bateau, avec sa chaine et du câblot, au cas où le mouillage principal aurait des difficultés. J’ai par le passé utilisé plusieurs fois cette technique, utile quand on doit subir un coup de vent qui ne changera pas trop de direction. Le principal inconvénient, c’est que la chaine de l’ancre secondaire peut s’emmêler, c’est pourquoi une fois que l’ancre secondaire est au fond, je déroule un peu de mouillage principal pour étaler la chaine du mouillage secondaire en même temps… on est plus tout à fait en plomb de sonde mais au moins il n’y a pas de risque d’emmêlement, mais attention si le vent faiblit, la chaine du mouillage principal peut rattraper l’ancre secondaire. Pour cette configuration à deux ancres, la récupération est plutôt facile.

Avec une alarme de mouillage et une vigilance permanente on peut aussi laisser l’ancre secondaire sur le pont, prête à être larguée. Si le mouillage principal cède on mouille l’ancre secondaire en quelques secondes pour rattraper le coup, technique plusieurs fois mise en œuvre dans des situations où nous nous sommes mis à l’abri temporairement sans avoir la possibilité d’affourcher.

L’affourchage

Mouillage affourché avec deux ancres (affourchage)

J’aime beaucoup cette solution. Elle peut s’utiliser dans tous les cas où le vent ne tournera pas trop, même s’il est fort. Elle consiste à utiliser deux mouillages indépendants, le principal et un secondaire que l’on peut mettre en place avec l’annexe (la technique est décrite plus loin) ou depuis le bateau en manœuvrant pour dérouler l’un puis l’autre. Les deux lignes de mouillage forment un angle de 90° et la direction générale du vent passe par sa bissectrice.

Contrairement à toutes les techniques précédentes, elle est respectueuse des fonds, car les chaines restent à la même place au lieu d’effectuer un ratissage permanent, destructif et bruyant quand il y a des roches ou du corail. Les deux mouillages sont complètement indépendants, si l’un d’eux lâche, l’autre prends le relais. Enfin, avec cette technique le bateau ne se balade pas, l’alarme de mouillage peut donc être configurée avec un rayon d’évitage aussi petit que possible pour être prévenu du moindre problème : vent qui tourne ou ancre qui dérape. Les inconvénients ? Il faut de la place et idéalement un vent dont la direction reste dans l’angle formé par les deux mouillages.

Mouillage avant et arrière (embossage)

Mouiller 2 ancres à l'avant et à l'arrière (embossage)

Voilà une configuration qui m’a donné du fil à retordre… mon premier conseil est de s’assurer que la situation se prête à ce type d’immobilisation. Car il s’agit bien ici d’une tentative d’immobilisation avec seulement deux ancres. Cette technique fonctionne par exemple dans le lit d’une rivière où le courant est toujours orienté de la même manière. On peut aussi utiliser l’ancre arrière par petit temps pour immobiliser le bateau et ainsi éviter qu’il fasse des lacets, très pratique pour déterminer avec précision la position du bateau à l’occasion d’un échouage volontaire.

Mais gare à vous si la houle se lève, le bateau va vouloir s’orienter parallèlement aux vagues et tirera fort sur les mouillages. Gare aussi au vent forcissant et tournant, le fardage rendra la situation difficile. Je me rappelle d’une fois où la houle s’est levée rendant le mouillage inconfortable, j’ai tenté pour cela d’orienter le bateau face au vagues avec une deuxième ancre à l’arrière, sans succès. Comme solution d’immobilisation, il me semble que le mieux est d’anticiper le coup en utilisant au moins trois ancres.

Immobilisation avec trois ancres

Mouiller 3 ancres (immobilisation)

Avec une ancre à l’avant et deux à l’arrière, ou l’inverse, le tout bien tendu, le bateau ne bougera plus ou presque. Cette configuration un peu lourde à mettre en place est utile quand le bateau doit être immobilisé, par exemple dans un mouillage étroit avec récifs et haut fonds. Ça fonctionne, Oleo se prête bien à la configuration avec deux mouillages arrière en plus du mouillage avant. On a utilisé cette technique dans le mouillage de Cul de Sac à St Martin pour maintenir le bateau dans une zone étroite et peu profonde entre un haut fond, de gros objets immergés et des bouées pour petites embarcations. Il y a tout de même des inconvénients à cette solution tels que la lourdeur de la mise en place et le fardage dû à l’immobilisation, qui peut mettre la tenue des ancres à l’épreuve. Attention, il faut aussi que le marnage soit nul ou très faible et qu’il n’y ait pas trop de circulation autour, car les chaines et cordages tendus sont de vrais pièges pour les hélices, les quilles et les safrans.

Techniques pour mouiller et lever les ancres

Rappelons que pour qu’une ancre tienne, il faut que l’effort de traction s’exerce le plus horizontalement possible, ce qui nécessite de mettre autant de chaine et de câblot que la profondeur l’exige (entre 3 et 7 fois la hauteur en fonction des situations). Notre mouillage principal est constitué d’une grosse ancre (spade 20kg), d’une longue chaine (50m) et d’un câblot solide. Les mouillages secondaires sont constitués d’ancres de tailles diverses avec des chaines moins longues et beaucoup de câblot.

Pour mouiller l’ancre principale, la technique est facile, on se place face au vent là où on veut déposer l’ancre que l’on mouille en reculant. Avant d’envoyer toute la chaine nécessaire à la tenue du mouillage on s’assure que l’ancre croche avec une petite marche arrière. Certains mouillent en marche avant dos au vent mais je ne suis pas très fan de cette technique. Une fois la chaine déroulée on place une main de fer qui fera office d’amortisseur et assurera le mouillage en supportant la charge.

Pour mouiller une ancre secondaire avec l’annexe (porter le mouillage), on prépare d’abord le mouillage qui doit être constitué d’une ancre pas trop lourde (pour faciliter sa manipulation à la main), d’une chaine de 10 à 20m, d’un câblot aussi long que la profondeur l’exige suivi d’un long bout de guidage. On dispose le tout dans l’annexe de manière à ce que le mouillage se déroule correctement. Depuis le bateau on repère l’endroit où il faut mouiller, on s’y rend en annexe, on dépose l’ancre au fond puis la chaine en étalant un peu avec le moteur de l’annexe (inutile de trop tirer, il faut ménager ses forces). On revient au bateau en déroulant le câblot puis le bout de guidage qu’on attache au taquet voulu. Ensuite, on a plus qu’à reprendre le bout de guidage jusqu’au câblot que l’on frappe au taquet. Petit détail important : lorsqu’un câblot doit trainer dans les fonds, il faut à tout prix bannir roche, corail et fonds tranchants. Comme mouillage secondaire j’apprécie mon ancre spade en alu de 7kg facile à manipuler, qui m’a toujours donné satisfaction.

On peut aussi affourcher deux ancres sans utiliser l’annexe, en déposant d’abord le mouillage secondaire perpendiculairement au sens du vent (le câblot doit être pré-frappée au taquet voulu et le bateau avance en crabe de manière à ce que sa route soit perpendiculaire au vent), puis en mouillant l’ancre principale et sa chaine au fur et à mesure que le vent fait reculer le bateau, jusqu’à ce que les deux mouillages aient la même longueur. Cette technique fonctionne avec vent fort et fond de sable. Si tout se passe bien, le câblot de l’ancre secondaire reste tendu pendant l’opération.

Enfin, il me semble important aussi de prévoir une évacuation d’urgence. Pour cela, ma technique consiste à frapper (à l’avance si possible) un pare-bat à l’extrémité des mouillages secondaires de manière à pouvoir m’en débarrasser en 2 secondes (puis les récupérer par la suite avec une gaffe). Pour l’ancre principale c’est un peu plus difficile… soit on la récupère au guindeau si c’est possible, soit on déroule jusqu’au câblot que l’on coupe si nécessaire. Un relevage normal peut se faire soit avec la technique du pare-bat, soit en donnant du mou afin de récupérer les mouillages l’un après l’autre.

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