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Navigation solitaire : dormir en mer

Partir seul en mer dans un voilier n’est pas recommandable. Le CROSS et les organismes chargés de la sécurité conseillent d’avoir au moins deux navigateurs expérimentés à bord. La presse spécialisée parle pudiquement « d’équipage réduit » pour désigner un équipage de une ou deux personnes.

Pourtant, naviguer en équipe et en solitaire n’a rien à voir. Dans un cas il y a vie de groupe, partage des tâches et du repos. Dans l’autre le skipper est livré à lui-même. Il ne peut en aucun cas assurer une vigilance permanente sur plusieurs jours. C’est pour faire suite aux discussions sur ce sujet et parce que nous sommes nombreux dans ce cas que j’ai choisi de rédiger cet article, inspiré de mon expérience de jeune navigateur.

Coucher de soleil sur l'île de Sercq (Sark)

On nous le répète, les règles de sécurité exigent une veille visuelle et auditive constante. Il faut aussi être en forme, car c’est par la fatigue que les erreurs surviennent. Bref, il est nécessaire de dormir suffisamment pour être prêt à réagir !

Lors de mes premiers essais, j’attendais le besoin de dormir pour me mettre au lit. Je tombais rapidement en sommeil profond. Les réveils étaient durs, ça me rendait vaseux et peu opérationnel. Dans le pire des cas je n’entendais pas le réveil (pourtant très strident) et laissais passer un cycle de sommeil complet au bout duquel je me réveillais stressé.

La plupart des skippers professionnels adoptent des cycles de 10 à 20 minutes, assurant une fréquence de veille élevée. Cette information n’est pas un scoop, elle va de soi. Malgré tout, s’imposer un tel rythme est difficile, à tel point que nombre de navigateurs pensent ne pas y arriver.

Brouillard au Nord de Bréhat

Le déclic, je l’ai eu après avoir considéré mon repos comme une priorité absolue. Alors que, la fatigue aidant, j’étais à bout de force devant la passe Nord de l’Aber Wrac’h que je n’ai pas osé prendre de nuit, j’ai décidé de ne rien faire d’autre que dormir par tranches de 20 minutes jusqu’au Fromveur. Au début c’était dur, mais ce rythme, je l’ai finalement maintenu cinq jours durant, jusqu’à Capbreton. Sauf pour quelques exceptions : manœuvres pour éviter des collisions, passage du Fromveur et du Raz de Sein, brouillard.

Mon « secret », c’est d’adopter ce cycle de siestes de 10 à 20 minutes sans interruption, même quand on est pas fatigué. En d’autres termes, habituer son corps à maintenir ce rythme nuit et jour, sauf nécessité absolue : tour d’horizon à la jumelle, vérification de la route, repos et ainsi de suite sans discontinuer.

Le temps passé à dormir est long : 14 à 18 heures par jour en moyenne ! Mais habituer son corps à s’endormir sans être fatigué, c’est rester sensible au moindre bruit suspect, se réveiller toujours en pleine forme, réduire le stress et donc améliorer le rendement du repos. Je peux vous dire que ça change la vie ! Surtout lorsqu’un problème survient et nécessite sang froid, rapidité et précision.

Enfin, le corps humain est une machine bien plus perfectionnée qu’on ne l’imagine. Au bout de trois jours de pratique je n’avais plus besoin de réveil strident pour me lever à l’heure : j’ai passé les deux jours restants à éteindre le réveil quelques secondes avant qu’il ne sonne. Mon dernier jour de mer s’est soldé par une tempête accompagnée d’une houle inconfortable et malgré le vacarme et la gîte, le rythme s’est maintenu. Arrivé à Capbreton à 8h00 du matin, je me suis payé le luxe d’être en forme toute la journée jusqu’à tard dans la nuit, à mon grand étonnement.

Mouillage dans l'île de Sercq (Sark), tout seul en plein mois de Juillet

Un dernier truc qui m’a bien aidé : de bonnes jumelles. Mon compte en banque a crié famine quand j’ai fait l’acquisition des miennes (qui coutent le prix d’un radar moderne que je ne possède pas). Être capable de distinguer le moindre détail au loin est sécurisant, grâce à cela je peux dormir tranquille après mon tour d’horizon.

Pour conclure, votre solution sera peut-être différente de la mienne et plus adaptée à vos habitudes. De mon côté, je suis content d’avoir trouvé cet équilibre. Quoi qu’il en soit, nous sommes généralement d’accord sur un point : pour bien naviguer il faut être en forme et pour être en forme, il ne faut pas être fatigué. Alors je vous souhaite un bon repos accompagné d’une veille attentive et régulière. Le reste suivra !

Quelques liens utiles :

3 réponses sur « Navigation solitaire : dormir en mer »

Bonjour. Oui, c’est bien Oleo, il y a quelques années quand il n’était pas encore bardé de tubes et autres accessoires 🙂

D’accord, merci pour ta réponse 😉

Magnifique périple Atlantique en passant, ça fait rêver. Et je kiffe ton avatar sur HEO 😉 moi aussi j’utilise ce petit poisson bleu 😉

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